Sucreries : Viva la Saya !

Sucreries : Viva la Saya !

Expression revendicatrice de l’identité culturelle afro-bolivienne, ce programme musical et actions de médiation culturelles construites autour du même en sont un hommage. En effet, Viva la Saya ! souhaite proposer une nouvelle manière de regarder les musiques où la présence des cultures africaines se perçoit directe ou indirectement.
Dans ce projet, l’esquisse d’un imaginaire sonore à travers le temps dans l’encrage territorial de la région de Sucre en Bolivie, est construit avec des musiques baroques écrites à la manière espagnole et portugaise et musiques créées pour accompagner danses et festivités relieuses d’origine populaire et transmises par tradition orale.
Partant de la musique qui accompagne les festivités religieuses d’aujourd’hui en Bolivie où les éléments rythmiques et chorégraphiques rappellent les sonorités africaines, mélangées aux indigènes, ce programme est un retour du traditionnel vers le baroque, au temps des musiques de la chapelle de La Plata (actuellement Sucre) au 17em siècle, vers les villancicos de negros, qui représentent les noirs et leurs manières de festoyer selon le regard des espagnols.

Musiques sacrées savantes et musiques populaires interagissaient et catalysaient des intentions artistiques, de subordination et d’identité. Ceci construisait un vaste paysage sonore marqué par une pluralité des « manières de faire », qui à ce jour, restent en quelque sorte encore d’actualité et qui seront racontés dans ce temps joyeux qui invite à festoyer la présence afro dans le paysage sonore sud-américain. Viva la saya !

Genèse de Sucreries : Viva la Saya. Note d’intention de la directrice de l’Ensemble Alkymia.

Depuis 2016 l’Ensemble Alkymia mène des recherches et projets autour des manuscrits du fond musical de l’Archive Nationale de Bolivie dans la ville de Sucre. Ce corpus est essentiellement vocal, en espagnol et est l’une de seules sources musicales écrites de la période coloniale dans l’actuel territoire bolivien.

Ces actions on été nourris par l’intérêt que je porte aux pratiques corégraphiques qui reflètent le syncrétisme entre celles venues d’Europe au 16e et 17e siècles et celles qui se sont construit avec les différentes communautés établies autour des mines de Potosi ; espagnoles, métisses, indigènes descendants des Incas (mais pas que) et enfin d’esclaves d’origine africaine.

En 2023, j’ai réalisé un mémoire de recherche autour des Negrillas ; pièces baroques présentes dans le corpus de la Cathédrale de Sucre, en langue espagnole « à la manière de parler des noirs » et écrites par les maîtres de chapelle espagnols ou créoles, et son lien avec les Tundiquis et Caporales ; danses d’origine indigène et métisse qui représentent les noirs ou s’en inspirent, et enfin avec les Sayas ; musiques produites par les membres de la communauté afro-bolivienne eux mêmes. Avec mes recherches sur l’écosystème musical colonial, j’ai pris connaissance des témoignages des manières de pratiquer la musique et la danse et comment elles ont survécues, se sont développées, ou encore se sont perdues ou transformées. Je vois un grand intérêt dans ces productions musicales représentatives avant tout de métissage culturel.

La première partie du projet, soutenue par la Bourse de recherche de la Fondation Nguyen, est un voyage en Bolivie en août 2023 pour réaliser une enquête pratique des musiques d’influence africaine, mais aussi de celles qui ont pu être produites par les indigènes et métisses qui observent les manières de faire des africains. Le patrimoine musical et chorégraphique construit autour de la présence africaine représente pour moi un pilier de l’identité musicale bolivienne, qui témoigne bien évidement aussi de l’influence européenne (espagnole principalement) et indigène.

Le programme Sucreries : Viva la Saya ! En 2024 sera construit à partir des villancicos de Negros et Indios de l’Archive Nationale de Bolivie ainsi que des pièces apprises des personnes qui vivent aujourd’hui les traditions, une proposition artistique autour de ces musiques qui me touchent et qui je pense peuvent faire découvrir un repertoire ancien et traditionnel sous un autre jour.

En effet, ce programme musical est un hommage aux cultures invisibilisées dans le passé et une invitation immersive dans l’imaginaire sonore que nous allons reconstruire grâce à nos recherches et nos sensibilités. Ce projet est le deuxième volet d’un programme de musiques baroques de Sucre et traditionnelles qui a vu le jour en 2021.

Compétences

Posté le

27 août 2023

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