Le quatuor est un ensemble multicolore oscillant entre la musique contemporaine, la poésie sonore et le free jazz. Flûte, accordéon, violoncelle, et voix mêlent leurs sons et s’accompagnent dans les trois récits qui les rassemblent.
Le 1er mouvement, GIEC ça ne rime pas, est un monologue intérieur, un moment de réflexion et de méditation sur la poésie et le son des mots. Entourée d’une musique large, où tombent quelques grappes de sons, la comédienne cherche à incarner les mots du rapport du GIEC. Elle se heurte bien vite, à la réalité des sons, des mots employés, des formules froides et précises qui ne laissent aucune place à une pensée poétique.
Ma grand-mère, le 2ème mouvement, est une série de d’interactions, de notes sur ce que l’on sait des autres, de petits commentaires qui en disent long. Le personnage demande à la cantonnade, à droite, à gauche, au fil d’un mouvement musical en zapping.
La manif, le 3ème et dernier mouvement, est un moment où la voix se perd dans la foule, elle se décompose en bribes, syllabes, et ce qui nous parvient est peut-être ce que nous voulons entendre. Tout au long de la composition, le quatuor tangue entre musique bruitiste, dansante, aérée et résolument vivante. Il accompagne ainsi les acrobaties et les tours de souplesse que la voix doit réaliser pour lier les récits des différents mouvements.
Le cinquième musicien des Jours Ordinaires est un ensemble grandissant de miniatures sonores. Les miniatures ouvrent la composition, interrompent le quatuor, commentent, résonnent et installent des voix du monde extérieur comme décor de la musique. Ce sont des listes de courses, des bout d’articles, un mot, une définition, ce sont autant de haikus modernes, de traces de nos histoires, de nos choix, de nos idées. Cet ensemble de miniatures est plus grand que le spectacle, il s’étoffe au cours du temps et produit des thèmes nouveaux dont naissent de nouvelles miniatures qui pourront s’y ajouter et transformer le spectacle au fil du temps, au gré d’enregistrement nouveaux, et/ou d’occasions de collaborations.
S’inspirant à la fois de l’Infra-ordinaire de Georges Pérec, et du Journal du dehors d’Annie Ernaux, Les Jours Ordinaires traverse ces mots quotidiens, et donne à chacun un espace d’écoute et de poésie. Ces mots sont mis en sons, en images, en voix et en couleurs, par une infinité d’artistes de passage : musicien.nes, spectacteurs.trices, comédien.nes, professionnel.les et amateurs.trices. Les miniatures peuvent être composées, improvisées et guidées, elles peuvent être prétexte à la rencontre, ou objet de mûre réflexion. Elles sont dites, chantées, jouées, filmées, dansées, peintes, ou sculptées… Des moments furtifs, repartis aussi vite qu’ils sont arrivés, et proposant une écoute fraîche, hors du cadre, sans préambule.
Conçue comme une mosaïque de miniatures de laquelle émergent les trois mouvements-récits, la composition joue avec sa propre forme et avec les multiples façons d’écouter, de lire, de regarder. Elle prend trois formes d’expression en direction du public. Le concert est la forme vivante, moment de création où les miniatures nuancent et éclairent les récits. Ensuite, l’exposition, une mosaïque de cartes postales s’installe en épousant les contours d’un lieu de vie, de passage et de partage, et les miniatures résonnent ensuite devenant l’horloge de ce lieu. Et enfin l’exposition numérique, où les miniatures s’ajoutent et se répondent sur un site web dédié, comme autant de petites fenêtres sur le monde. Chercher la poésie dans le banal et l’ordinaire, chercher la mélodie et le rythme dans les mots normaux, sans fard, c’est transcender tous ces moments et les faire exister dans une dimension parallèle, artistique. C’est parfois redonner leur sens à ces mots usés d’être des cases. C’est surtout revendiquer le besoin de poésie et d’imagination, comme un remède contre la peur, c’est revendiquer que les arts, et particulièrement du spectacle sont faits par toutes et tous et pour toutes et tous.