Du troubadour médiéval à la monodie de la renaissance, tout en passant par le lied allemand ou les « pop » des dernières décennies, le genre de la chanson est un incontournable dans la culture occidentale au cours des siècles. Dans LOVE.SONGS, Bazar Électrique (Paris) et LUX:NM (Berlin), ensembles issus de deux capitales iconiques de la scène de musique contemporaine, entrent en synergie pour décloisonner et explorer le concept de ‘chanson’ dans tous ses états dans un programme avec une création mondiale d’Aurélio Edler-Copes (France/Brésil) mise en miroir avec trois pièces du premier disque de Laurie Anderson (EUA), icône de la musique expérimentale des années 1980, ainsi qu’une œuvre récente de Sarah Nemtsov (Allemagne).
Ces deux collectifs fortement engagés dans la création contemporaine ont la particularité d’intégrer des instruments amplifiés, électriques et l’électronique dans des programmes originaux et audacieux et envisagent un échange de musiques et d’idées dans les années à venir au sein de leurs espaces culturels respectifs.
Dans ce programme autour de la chanson sous toutes ses formes, les deux ensembles souhaitent mettre en miroir trois pièces du premier et iconique LP de Laurie Anderson, Big Science, sortie il y a 40 ans avec la nouvelle création Love Songs du compositeur Aurélio Edler-Copes.
Big Science est le premier album de l’artiste d’avant-garde en 1982. Il est surtout connu pour le single « O Superman », qui a atteint inopinément la deuxième place au Royaume-Uni. Aurélio Edler-Copes a réalisé un arrangement au plus proche de l’original pour voix, vocodeur, saxophone, samplers et échantillons originaux de 1982, synthétiseurs de l’époque saxophones, guitare et basse électriques. Les trois titres présentés sont From the Air, Walking & Falling, O Superman.
Love.Songs, d’Aurélio Edler-Copes, est un cycle de chansons pour voix amplifiée, cinq instrumentistes (guitare électrique, saxophone, violoncelle, synthétiseur/sampler, radio/thérémine) et électronique analogique et numérique, d’une durée de 30 minutes. La proposition de ce cycle est d’explorer la subtilité musicale à l’intérieur d’un dispositif constitué d’une voix amplifiée et d’instruments électriques/amplifiés transformés par des pédales d’effet analogiques et l’électronique en temps réel. Le compositeur prendra comme référence des chansons d’amour de plusieurs époques et lieux comme les troubadours d’Occitanie, les madrigaux italiens et anglais, les lieder allemands, mais aussi la chanson française ou la pop allemande et internationale des années 1980. Au totale, 10 pièces, d’environ trois minutes chacune, dans lesquelles il travaillera certains éléments de ces chansons (fragments du texte, le caractère, certaines inflexions mélodiques ou harmoniques, patrons rythmiques, timbre, etc.) et les explorera dans son écriture personnelle. Pour le compositeur, il ne s’agit pas de collage ni de citation, mais plutôt d’une ouverture à d’autres univers poétiques et de l’intégration de certains de leurs éléments comme point de départ d’une nouvelle création. La voix guidera l’auditeur avec des univers contrastants tels que la voix radiophonique, chantée, récitée, parlée, transformée par l’électronique ou, encore, avec des chuchotements proches du phénomène ASMR [Autonomous Sensory Meridian Response]. Une force sonore tout en retenue, prête à exploser, qui donnera la couleur à une œuvre à la fois puissante et poétique, ancrée dans le présent tout en regardant la tradition et s’ouvrant vers le futur.
Ces deux recueils de chansons, mettent au premier plan la voix parlée, chantée, modulée par le vocoder, et les synthétiseurs analogiques (Minimoog, Solina, Korg VP-330). Chez Laurie Anderson , le flux de la parole, des histoires racontées et des images poétiques sont au centre de ses pièces, chez Aurélio Edler-Copes la poésie sonore, concrète, les mots signifiants et les mots mantras qui devient son à l’état pur. L’électronique et l’amplification devient moyen de transcendance du phénomène sonore, au même titre que Sarah Nemtsov parle d’imagination amplifiée dans sa pièce White Eyes Erased, duo explosif pour percussion, keyboard et électronique.
Dans White Eyes Erased, Sarah Nemtsov explore dans cette pièce les extrêmes entre une ‘esthétique de la fragilité’ et ‘le courage d’être laid’, en utilisant des dispositifs d’effets analogiques et des gestes théâtraux et vocaux (textes échantillonnés et voix en direct avec mégaphone) pour produire des visions abstraites de la réalité. La notion de son et ‘d’imagination amplifiée’ est au coeur de la pièce.
Le programme sera présenté en concert à Paris le 20 octobre 2023, lors du festival Live.Bazar au Théâtre Dunois et à Berlin le 12 novembre 2023, dans la saison de concerts de LUX:NM au Spielstättenbescheinigung im Kesselhaus der Kulturbrauerei.