LE CABARET COMME TERRAIN DE JEU
Le cabaret offre aux artistes et au public la possibilité de se retrouver dans une frontalité poreuse. Santos Inocentes tient à ce face-à-face pour développer un travail relationnel : la proximité avec les spectateur·ices, une petite jauge, des sièges amovibles, jeu musical sans amplification, une théâtralité concise… Des éléments minimes visant un contact étroit entre artistes et public, un art scénique souple – intimement lié au quotidien.
ÉCONOMIE DE MOYENS
Inspirés par la démarche de l’Arte Povera, Alvaro et Lola décident consciemment de bâtir un spectacle avec un minimum de moyens. Deux corps, une guitare, une trompette, quelques accessoires (lumières de vélo, bottleneck, costumes).
De cette « contrainte » nait un travail qui se concentre sur l’interaction entre les deux artistes, leurs corps, le son, l’espace, la référence culturelle détournée, l’action artistique désacralisée, le quotidien rendu étrange.
DISSOCIATION
Lola et Alvaro se servent de leurs ressorts techniques (musique, danse, performance) forgés par des années d’expériences dans des domaines scéniques divers, en même temps que leur jeu vient explorer des actions de la vie courante superposées à des archétypes musicaux connus du public.
C’est là l’un des enjeux principaux de la performativité du duo, la dissociation entre une action que le.la spectateur·ice pourrait se sentir capable de réaliser à tout moment, et une action que seulement un.e artiste d’expérience peut réaliser sur scène (avec un degré de technicité).
MUSIQUE ET LIBIDO
Au fil des expérimentations de Lola et Álvaro, une autre ligne se dessine dans la mise en scène de leurs numéros. Un parallèle entre l’énergie érotique et le flux musical, entre le geste qui provoque ou accompagne le sonore et la manœuvre visant le plaisir sexuel. Ce leitmotiv vient ajouter une nouvelle strate – l’association de deux pratiques sacrées et universelles chez l’être humain : l’art et la sexualité.
TOTEM ET TABOU
Les deux artistes choisissent des matériaux musicaux clairement identifiés dans la mémoire collective, des chansons ou des styles « totem » de la culture populaire. Chacune de ces matières musicales s’accompagne d’un imaginaire corporel et culturel, qu’Alvaro et Lola s’attèlent à réinterpréter le plus souvent par des incursions dans la désacralisation.
C’est l’introduction de cette de la non-normativité dans des actions liées au quotidien, dans l’ »objet trouvé », qui amène à nouveau la dissociation, le contraste recherché par le duo madrilène.
MÉMOIRE AFFECTIVE, MÉMOIRE DU CORPS
Lola et Alvaro esquissent ou esquivent la parole et le texte de manière consciente. Ils proposent une expérience sensible à partir d’embuscades tant corporelles que sonores, jeux avec la perception des signes et des représentations.
Leur répertoire se veut éclectique et surtout guidé par l’enracinement de chacun des morceaux dans leur mémoire affective :
/ ‘Bésame mucho (bolero, Consuelo Velázquez)
/ ‘Angel Over Montgomery (folk Amérique du Nord, John Prine – Bonnie Raitt)
/ ‘Stonewall Street Blues (blues années 20, Blind Blake)
/ ‘Maria – West Side Story (comédie musicale, Leonard Bernstein)
/ ‘The Shape of You (pop, Ed Sheeran)
/ ‘Estranha forma de vida (fado, Amalia Rodrigues – Alfredo Marceneiro)
/ ‘Seguiriya (flamenco – traditionnel)
/ ‘Escobilla’ (flamenco – traditionnel)
/ ‘El Manisero (son cubain – Moisés Simons)
L’inextinguible besoin de s’exprimer préside la démarche d’Alvaro et de Lola.