Avec Timelessness, Thierry De Mey se livre à l’exercice de l’autoportrait en
réunissant des pièces anciennes et nouvelles au sein d’un même spectacle. Ce
projet est mûri de longue date avec les Percussions de Strasbourg, et il en parle
comme d’un « manifeste artistique et politique ». L’engagement du compositeur
se trouve avant tout à l’endroit du corps et de sa mise en valeur dans la pratique
musicale. Là où un tabou marque en profondeur notre histoire, notamment par la
neutralisation de la présence des musiciens avec des habits noirs, Thierry De Mey
accorde une « visibilité » à ses interprètes et intègre à son écriture l’exposition de
leurs gestes et de leurs postures. L’économie de moyens qui en découle n’a rien
de simpliste : pour preuve, l’un de ses chefs-d’oeuvre, Musique de Tables (1987),
où les interprètes ne sont munis que de trois tables. Les mains, les doigts, les
ongles, les paumes ou encore les phalanges sont les instruments de ce théâtre
corporel. Les Percussions de Strasbourg s’emparent de la partition pour en faire
surgir le formidable potentiel scénique et musical.