Note d’intention de Julie Delille, metteuse en scène de UND
Julie Delille
« Je travaille dans la suggestion, j’utilise l’espace intérieur du spectateur, son cœur, son cerveau, son âme, pour façonner un geste qui est une sollicitation. C’est un espace métaphorique, un espace mental, et un grand geste crépusculaire.
Il y a bien sûr des références à la Shoah, mais ce n’est pas une “illustration”. D’abord parce que c’est impossible, ensuite parce que c’est ce que souhaite Howard Barker, qui défend l’art du théâtre, sa liberté jusqu’à la contradiction. Nous sommes sur un point de bascule entre l’Histoire et la Mythologie. Und évoque régulièrement, dans son monologue, la guerre de Troie. Ma mise en scène s’inscrit dans la mythologie. Le personnage avance, elle traverse le plateau dans un mouvement infini, un temps qui est un hors temps, un moment de lisière, un point de basculement. Elle est déjà là avant le début de la pièce, on peut imaginer qu’elle soit encore là après la fin. C’est aussi un voyage dans une forme de mémoire.
Je le rattache à mon rapport très puissant à l’animalité, à la question de la traque, de la chasse à courre.
On va déployer au fur et à mesure l’espace intérieur de chacun, et l’oreille va s’ouvrir exactement de la même manière. Pour aller chercher dans la musique de Daniel d’Adamo ce qu’il ne sait pas y avoir mis… C’est cela qui m’intéresse : pas ce que le compositeur me dit qu’il faut écouter, mais ce qu’il ne me dit pas ; pas ce que le chef me désigne mais ce qu’il ne veut pas me montrer. Ce que je fais est toujours en creux. Parce que l’on apprend du côtoiement des œuvres, et l’on enseigne parfois à leurs auteurs des choses dont ils n’avaient pas conscience. »
Présentation du projet :
Und est une femme aristocrate juive en temps de guerre qui attend son amant, son bourreau.
Und est une femme broyée contre l’espérance et l’irrévocable. Dans ses contradictions passent la présence et l’absence, le réel et l’imaginaire, le désir d’amour et la pulsion de mort. Und (Hund, « chien » en allemand) sonne comme le frisson fauve de la bête de meute.
Ici, le danger est sonore, au-delà du sens des mots, ce sont les bruits du dehors diffusés par l’électronique, la métamorphose insidieuse des 8 instruments joués sur scène autour de la narratrice debout au milieu du désastre.
Und n’est pas une pièce galante, , mais un thriller, la voix humaine y est à mille gouffres du monodrame de l’intimité amoureuse.
Und est un drame contemporain.